Tout acte médical doit prendre en compte le terrain du patient et les risques encourus par celui-ci.
Vous avez une valvulopathie nécessitant une intervention cardiaque, vous êtes donc classé comme patient à haut risque en ce qui concerne les soins dentaires. Même si l’image radiologique de votre abcès au niveau de votre incisive est petite, je vous déconseille tout traitement dentaire permettant de la conserver sur l’arcade. Il faut l’extraire comme les autres dents infectées.
Les dents ne sont pas des petits os à part, plantés dans les mâchoires. La dent est un organe vivant qui communique par la pulpe dentaire (constituée par des nerfs, des vaisseaux sanguins et lymphatiques) avec tout l’organisme. Lors d’une infection dentaire, des bactéries peuvent se diffuser dans le sang et venir se greffer sur d’autres organes, en particulier l’endocarde (membrane qui tapisse la paroi interne du cœur et recouvre les valves cardiaques).
Lors de la préparation à la chirurgie de remplacement valvulaire, vous faites partie des malades entrant dans la catégorie à haut risque d’endocardite infectieuse.
Le rôle des foyers infectieux est primordial dans la survenue d’une endocardite. La place de la porte d’entrée bucco-dentaire représente 36% des 1300 endocardites annuelles, avec 10% de mortalité.
Le risque de greffe bactérienne augmente avec la mise en place d’un corps étranger. Les endocardites lentes sur prothèses valvulaires (mécaniques ou bio-prothèses) représentent le quart des endocardites. L’étiologie dentaire représente 50% des endocardites tardives. Du fait du risque de mortalité, toute dent infectée doit être extraite 15 jours avant l’intervention cardiaque.
Nous ne pouvons donc, dans votre cas, envisager un traitement endodontique (ou reprise de traitement suivi d’une résection apicale) car seules les dents présentant un traitement endodontique parfait remontant à plus d’un an, sont conservées.
Je vous conseille donc d’envisager au plus vite l’extraction de vos dents. Ceci permettra au praticien d’avoir le temps de réaliser une prothèse amovible bien adaptée et esthétique. Cette prothèse ne sera que provisoire.
La pose d’implants n’est pas contre-indiquée en cas de prothèse valvulaire. Bien entendu, cette pose doit être pratiquée par un implantologiste confirmé en tenant compte de votre pathologie. Une collaboration entre l’implantologiste et votre cardiologue est obligatoire.
En ce qui concerne votre avenir dentaire, ayez une hygiène bucco-dentaire irréprochable, pratiquez des contrôles très réguliers afin d’éviter toute carie nécessitant une dévitalisation. Vous devrez avertir votre praticien de votre pathologie. Un simple détartrage nécessite la prise d’antibiotiques (Amoxicilline) un heure avant l’acte.