Si seulement, l’on pouvait avoir des cours d’émotion à l’école ? Des cours qui nous permettraient d’apprendre à ressentir, mais aussi à tendre vers les sensations qui nous plaisent ? En effet, il semblerait que le bonheur s’éduque…
Quand on écoute des personnes parler de leur état d’être, souvent, on a l’impression qu’il ne dépend pas d’elles : « J’ai tendance à être pessimiste, je suis heureux, je suis quelqu’un de mélancolique », ces expressions donnent à penser qu’une nature, immuable et figée, dirige notre caractère.
Pourtant, plus nous avançons dans la compréhension du cerveau, plus nous percevons que notre état dépend en bonne partie de la façon dont on le construit… il nous manque juste de savoir comment.
L’état optimal
Aussi nommé l’état de flux, cet état correspond aux moments où nous nous sentons le mieux, aux périodes durant lesquelles nous sommes satisfaits et heureux. Un célèbre psychologue Hongrois, au nom difficilement prononçable, Mihaly Csikszentmihalyi s’est rendu célèbre en étudiant cet état sous de nombreux aspects.
Certaines de ses études ont demandé à différentes personnes de noter, à des moments aléatoires de leur journée, leur niveau de satisfaction et ce sur de longues périodes. Les résultats nous apprennent des choses étonnantes, qui peuvent nous aider à mieux cerner ce qui nous fait du bien, et donc à augmenter notre bonheur général.
Quand sommes-nous heureux ?
La chose la plus surprenante par rapport aux idées reçues est qu’un état actif permet un plus grand bonheur.
Une étude réalisée auprès de plusieurs milliers d’adolescents montre que 44 % d’entre eux connaissent l’état optimal en faisant du sport, 34% du temps dévolu à un hobby et seulement 13% devant la télévision*. Les loisirs actifs créent donc plus de satisfaction que ceux qui nous permettent de rester passifs, et que le repos !
De la même façon, on remarque qu’une grande majorité de personnes ressentent l’état optimal plus souvent dans leur activité professionnelle que pendant leurs vacances. Nous sommes donc bien loin des idées reçues sur ce qui nous fait réellement du bien…
Qu’est ce qui nous rend le plus heureux ?
Les paramètres sont nombreux : en voici trois, parmi les principaux, faciles à cerner et surtout qui peuvent nous amener à nous poser des questions sur notre organisation de vie :
· Le défi : Il y a certaines conditions qui multiplient la fréquence d’apparition de l’état optimal. Ce qui revient le plus est la notion de défi : opposé à quelque chose qui nous demande de nous dépasser, nous nous sentons plus vivants et stimulés.
La facilité, au contraire, ne véhicule que peu d’émotions positives, même quand elle permet d’obtenir un résultat. Ainsi, un joueur d’échec connaîtra plus souvent l’état optimal en affrontant un adversaire qui lui est légèrement supérieur, même si il perd, que contre un adversaire qu’il battra facilement. Dans notre travail, être confronté à quelque chose qui nous demande de développer nos facultés aura la même conséquence, même si cela nous prend plus d’énergie au début, nous en sortirons grandi et avec un haut niveau de satisfaction.
· La sensation de progresser déclenche aussi l’état optimal, surtout quand les progrès sont mesurables. Se fixer des objectifs clairs et faciles à valider régulièrement semble donc être une attitude positive pour augmenter son niveau de bonheur. Les personnes qui ne prennent pas le temps de mesurer leur progrès où qui se fixent des objectifs trop éloignés peuvent rapidement manquer de stimulations positives. Décomposer un objectif en petites étapes est donc une solution possible.
· Enfin, le regard extérieur semble jouer un rôle conséquent : recevoir des feed-backs constructifs et positifs est particulièrement stimulant. On en déduit que s’avoir s’entourer de personnes qui savent reconnaître et mettre en mots notre évolution est important…
Comment reconnaître l’état optimal ?
Ce n’est pas le plus simple, puisque cet état nous coupe bien souvent de la réflexion : le remarquer nous en ferait déjà un peu sortir ! Mais des principes reviennent tout de même et sont faciles à identifier :
· L’état optimal correspond à une période de concentration intense sur le moment présent. La sensation d’être absorbé, « hypnotisé » est donc un bon indicateur.
· C’est un état dans lequel on est attentif à ce que l’on fait, mais sans penser au résultat à obtenir. L’acte de création par exemple remplit très souvent cette condition.
· Une perte de notion de temps est très souvent remarquée : c’est l’intensité émotionnelle qui en est la cause.
· L’oubli de soi : dans cet état, autant le corps que notre identité nous paraissent lointains. Passionnée, une personne peut oublier temporairement la sensation de faim tellement elle est accaparée, quelqu’un peut oublier ses peurs ou ses doutes et oser plus facilement. C’est un état de liberté.
En partant de ces idées, percevez-vous à quels moments vous vous rapprochez de cet état optimal ? Nous avons tous des tempéraments différents, et donc une façon unique de vivre ces états, mais plus vous serez conscient de ce qui les provoque, plus vous saurez accorder de l’importance à ce qui stimule cette sensation de « flux » et à lui accorder de la place dans votre vie.
* C. Bidwell, M. Csikszentmihalyi L. Hedges et B. Schneider : Attitudes ans Expériences of work for américan Adolescants, New York, Cambrige University Press, 1997